Bruno Le Loup habite le quartier depuis 2016. Un an après son emménagement commence les nuisances qui n’ont cessé de prendre de l’ampleur. Depuis son deuxième étage, tous les jours à 18 h, il subit le phénomène. "Même avec la télé, on n'entend plus rien, ça résonne jusqu’au 5ᵉ étage, parce qu’ils ont des échappements libres."
"C’est dommage, c'était un beau quartier et là, c'est la zone"
Bruno Le Loup observe également les passages des véhicules sur les trottoirs. "C’est un vrai problème de sécurité, les mamans n'osent plus prendre les trottoirs avec les enfants", de peur qu’ils ne se fassent renverser. Un constat que partage Alexandra, habitante de Ginko depuis trois ans, "Moi, j'ai un bébé de deux ans : soit je le mets dans la poussette, soit je suis obligée de le porter." Avant de reprendre,"la dernière fois, il faisait de la trottinette, j’ai dû l’arrêter : ils faisaient de la moto sur le trottoir."
Bruno raconte également les défis que les jeunes motards se lancent : "Ils passent devant le tram à la dernière minute."
Une pétition de riverains excédés
Depuis plus d’une semaine, Bruno Le Loup a mis en ligne une pétition qui a pour vocation de rassembler les mécontentements, afin de faire pression sur les pouvoirs publics. "Il faut saisir les motos là où elles sont. La police a fait une descente aux Aubiers, mais un mois après, ça a recommencé", soupire-t-il. Également signataire de la pétition, Alexandra assure qu'à l'issue de cette saisie dans l’enceinte d’une école primaire du quartier, les deux-roues ont été restitués à leur propriétaire.
Aujourd’hui, la jeune maman désespère et envisage de déménager. "Au bout d’un moment, je pense que les riverains en ont tellement marre, qu’il peut se passer quelque chose s'ils font justice eux même".
Depuis 2018, la loi a été renforcée en la matière. Cependant, Bruno se désespère : "Lors d’une réunion de quartier, j'en ai discuté avec la commissaire de police. Elle m’a dit que dans la mesure où ils ne portent pas de casques, les forces de l'ordre n'ont pas le droit de les poursuivre, au risque de les mettre en danger."
"Une colère légitime", selon la mairie de Bordeaux
Contactée, la mairie de Bordeaux, qui a pris connaissance de la pétition, assure être pleinement consciente du problème. "La colère des riverains, elle est légitime et incontestable", commente Amine Smihi, adjoint au maire en charge de la sécurité.
L'élu rappelle que les rodéos à Ginko, comme dans d'autres quartiers de Bordeaux, ne sont pas un "phénomène nouveau".
"En réalité, la réaction des riverains, c'est parce qu'il y avait eu un mieux ces derniers mois avec des opérations de saisie par la police nationale", poursuit-il avant de confirmer les dires d'Alexandra, à savoir que les deux-roues sont rapidement revenus dans le quartier, "au grand désespoir des riverains".
Les auteurs des rodéos ont fait l'objet d'une procédure pénale. Mais la justice ne peut pas s'opposer à la restitution des motos, dans la mesure où le propriétaire n'est pas l'auteur des faits.
Amine Smihi,
adjoint au maire de Bordeaux à rédaction web France 3 Aquitaine
Pour l'adjoint au maire, le contexte mêlant les vacances scolaires, l'arrivée des beaux jours et la mobilisation des forces de l'ordre sur les manifestations dans le centre-ville, favorise la multiplication des débordements et incivilités."Depuis trois ans, le nombre d'opérations sur les rodéos et le nombre de motos saisies est assez conséquent", rapporte-t-il. Mais il le sait, le phénomène ne sera pas enrayé en un jour.
"Cela demande du temps, cela demande d'y retourner de nombreuses fois pour identifier les auteurs, ainsi qu'un gros travail de prévention et de médiation. Il faut également identifier les lieux de stockage des motos pour en informer la police nationale", poursuit-il.
Rodéos urbains : que dit la loi ?
Concrètement, la loi considère les rodéos urbains comme une "conduite répétant de façon intentionnelle des manœuvres constituant des violations d'obligations particulières de sécurité ou de prudence prévues par les dispositions législatives".
Lorsqu'elle est caractérisée, cette pratique peut être punie d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende. Début avril, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin a demandé dans une circulaire adressée aux forces de l'ordre de saisir automatiquement les engins utilisés.