La réalité est bien différente. Les grands hypers souffrent de la crise, certes, mais ils continuent de dominer le commerce dans le Grand-Bordeaux. En Gironde aussi d’ailleurs : en 2014, plus de 70 % des dépenses tous produits confondus ont été faites dans les grandes surfaces.
Situation pénalisante
[…] Lorsqu’ils présentent des projets d’extension devant la Commission d’équipement commercial (CDAC), les grands centres commerciaux ne sont pas forcément gagnants. En 2014, plus de 35 000 m² de demandes de surfaces commerciales nouvelles ont été présentées en CDAC pour le Grand-Bordeaux, et 33 000 ont été satisfaites. Mais aucune dans l’un des trois mastodontes [de l;'agglomération dont Bordeaux-Lac ]. Une situation jugée pénalisante à Bordeaux-Lac, qui n’a pas obtenu d’autorisation de s’agrandir depuis 2005.
Coincés dans leurs zones respectives, les centres se battent donc sur le renouvellement interne : nouvelles enseignes, réfection des galeries, etc. Mais aussi refonte des parkings et de la voirie, un paramètre clé pour le succès d’un hyper. […] Le Lac est encore à la traîne, malgré de récents travaux.
Vous avez probablement entendu parler, ces derniers temps, des difficultés d’accès au nouveau stade de Bordeaux. Eh bien pour Auchan Lac, c’est un peu la même chose, et cela fait des années que ça dure. Logé dans le même secteur de Bordeaux nord aux infrastructures dépassées, il subit les mêmes contraintes que le stade. Finalement, ce centre commercial a quelque mérite à bien figurer dans la liste des 100 plus gros hypers de France (il est 22e). Car c’est peu dire que, pour y aller et pour s’y déplacer, c’est souvent la galère.
Bienvenue néanmoins dans le premier hypermarché de l’agglomération. 177 M€ de CA, personne ne fait mieux, avec un hyper de 18 000 m2. Autour, un pole commercial d’environ 121 000 m2, avec 30 grandes enseignes majeures (Leroy Merlin, Décathlon, Norauto, etc.) et une locomotive incontestée : Ikea, l’un des plus grands de France. Le pôle commercial de Bordeaux-Lac, tout confondu, c’est 580 M€ de chiffre d’affaires. La galerie seule, avec ses 103 boutiques, dépasse 127 M€ de CA (hors hypermarché).
C’est donc un vrai poids lourd. Mais malgré son champion Auchan, Bordeaux-Lac s’est fait doubler par Mérignac Soleil, en terme de pôle commercial. Responsable d’Immochan pour le Sud-Ouest, la filiale immobilière de l’empire Auchan, Pierre Sabouret espère que 2015 marquera la fin des vaches maigres. « Auchan-Lac, c’est l’hyper leader de l’agglo, il résiste bien mais il ne grandit pas. On a fait une bonne année 2014. Mais notre dernier agrandissement remonte à 2005. On peut construire, puisque nous sommes propriétaires du foncier, mais il nous faut les autorisations en Commission d’équipement commercial (CDAC). Nous avons plusieurs projets dans les tiroirs, il y a des enseignes qui tapent à la porte, dont certaines qui ne sont pas encore présentes à Bordeaux, mais on doit avoir les autorisations… Le prochain tour de CDAC, on espère que ce sera pour nous. »
Objectif proximité
Une trentaine d’enseignes nouvelles pourraient s’implanter d’ici à 2020. En attendant, Auchan-Lac ne reste pas sans rien faire. En 2016, une partie de la galerie sera rénovée. L’an dernier, pour essayer d’apporter une solution aux difficultés de la circulation, Auchan a financé à 100 % une nouvelle bretelle de sortie sur le boulevard Aliénor-d’Aquitaine, après deux ans de négociation avec la Métropole. « On doit maintenant communiquer plus autour de ça, car les gens n’utilisent pas assez ces voies de sortie, ils continuent de tous sortir côté Lac… », souligne Pierre Sabouret.
L’autre grande mutation, c’est l’arrivée du tram (ligne C) dans le quartier limitrophe de Ginko, et le passage d’un bus au milieu de la zone commerciale. Auchan était fréquenté à 98 % par des automobilistes, mais depuis que les trams et bus sont là, ils amènent 15 % de la clientèle. « Ça, c’est la révolution », note le directeur d’Immochan. Gêné aux entournures dans un réseau de voirie qui a vieilli, le Lac se voit maintenant comme un hypermarché urbain, le frère nordique d’Auchan Mériadeck, de plus en plus rattrapé par la ville. Le plus gros des hypers joue désormais la proximité, ce qui n’est pas le moindre des paradoxes. Son objectif désormais : le client du quotidien, avec son petit panier.