Pendant que des marcheurs s’activent à faire le tour du lac de Bordeaux à pied, des familles se sont extirpées de la moiteur de ce samedi après-midi de septembre en s’installant à l’ombre du Cultura, au cœur de l’écoquartier Ginko. Un groupe de rock local ambiance la chaussée. Des familles se dandinent timidement mais apprécient le show.
Ce n’est pas la première fois que le magasin culturel et d’autres enseignes installées depuis peu dans le Centre commerçant Ginko organisent ce type d’événement. « Le quartier manque encore d’activités, surtout de restos, parce qu’il n’y a que de la restauration rapide. Mais ça avance petit à petit », glisse Ana, entre une guitare et une batterie. Non loin de là, des hommes discutent à la table d’un café. Des sportifs, en tenue seyante, vont pousser de la fonte à la salle de gym Basic-Fit.
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Le cadre plébiscité
Situé entre le lac de Bordeaux et la zone commerciale éponyme, Ginko, dont le premier programme a vu le jour en 2010, doit bientôt toucher à sa fin : les derniers logements, qui ont pris du retard, doivent être livrés courant 2022, ce qui portera à 7 000 le nombre d’habitants. À l’heure actuelle, plusieurs cellules commerciales restent vacantes ou attendent l’installation de l’enseigne sélectionnée.
Mais le quartier commence à avoir une jolie gueule, avec ses immeubles immaculés, ses appartements triangulaires bordés par les mares à canards et, avant tout, la vie, qui s’anime. Doucement mais sûrement, les habitants s’emparent de leur quartier. Il n’y avait qu’à observer, en ce week-end post-vacances d’été, les allées du centre commerçant, les jeunes à vélo, les groupes de copains qui sirotent un café en terrasse du coffee-shop…
Ou encore ce couple venu s’approvisionner à la boucherie du coin. « On est venu ici parce qu’on cherchait quelque chose de plus grand. On habitait aux Chartrons. Ici, c’est plus aéré qu’en centre-ville, on ne se sent pas oppressé, il y a des espaces verts, des points d’eau », savoure Thomas, papa d’Edgar et spectateur du concert. « C’est sympa, c’est assez calme comme quartier », enchaîne Ana.
Un « bon brassage »
Loin de la mauvaise réputation qu’on lui a rapidement collée à la peau (incivilités, déchets, malfaçons…), Ginko semble évoluer paisiblement. En ce dimanche matin, les familles que nous rencontrons n’ont pas de peine à évoluer dans leur quartier. Elles en disent très largement du bien, alors que des SDF poursuivent une nuit particulièrement arrosée.
« Franchement, c’est plus calme que je ne le pensais », confie Julien, qui vient juste de s’installer chez sa compagne avec enfants. L’homme sort d’un centre d’escalade appréciée des enfants du coin. « Il y a des vigiles, on ne se sent pas en insécurité », poursuit-il, en mettant en exergue à son tour un « bon brassage ». « Il faut trouver un juste milieu entre un truc pas trop bobo et la zone », estime-t-il. « C’est orienté familles mais, en même temps, on trouve tous les horizons. C’est ce qu’on était venus chercher », complète Thomas.
Mieux que les Bassins à flot
Pour l’heure toujours Lormontais, Quentin et Aurélie sont passés ce dimanche matin spécialement pour acheter du pain à Ginko. « On doit venir vivre ici. On patiente depuis deux ans », lance le couple. Les amoureux, 29 ans, ont opté pour une location-accession à Ginko parce qu’ils n’avaient pas le « budget » pour aller en centre-ville « pour le cadre ». « C’est un bon compromis », clament celle qui est secrétaire à la Maison départementale des solidarités d’Eysines et celui qui est courtier à Villenave-d’Ornon.
Les parents de Luka et Noa ont fait de la sécurité leur priorité : « On vient plusieurs fois par semaine, à différents moments de la journée, pour voir si ça craint. C’est notre seule appréhension. Sinon, le quartier est top. » « Contrairement aux Bassins à flot, les bâtiments ne sont pas les uns sur les autres, c’est plus harmonieux. Et puis il y a le lac, ce sera bien pour mes sorties pêche », détaille Quentin.
On vient plusieurs fois par semaine pour voir si ça craint. C’est notre seule appréhension. Sinon, le quartier est top
« Une fois qu’on sera tous ouverts, ce sera cool »
Cultura, Intersport, Intermarché, La Mie câline, Basic-Fit : les commerces, surtout des franchises connues du grand public, se multiplient dans la zone du « Centre commerçant » de Ginko, où se mêlent un parking souterrain - gratuit pendant deux heures pour les clients et accessible par un escalator - et des logements qui, pour la plupart, doivent encore être livrés.
De nouveaux fast-foods…
Pour cause de Covid-19, nombre de ces commerces, qui avaient prévu une ouverture au cours du premier semestre de l’année, n’ont levé le rideau que depuis une poignée de semaines. « C’est encore aléatoire, c’est le début, mais ça se passe bien. Une fois qu’on sera tous ouverts, ce sera cool », veut croire Jérôme, responsable de La Mie câline.
En face de la célèbre franchise de boulangeries, une troisième pâtisserie, un O’Tacos, Pitaya ou encore un McDonald’s sont attendus (en plus d’un HFC et d’un Str’Eat Burger), au grand dam des contempteurs de la malbouffe dans un quartier qui avait été labellisé « écoquartier » en 2014. « Il y a mieux que sentir l’odeur des frites toute la journée », ironise Ana, la « tatie » d’Edgar.
Ce dimanche, de nombreux riverains, cabas en main, se succèdent pour se retrouver chez Intermarché, histoire de faire quelques ultimes emplettes pour le week-end. À La Mie câline, une famille nombreuse est attablée à l’intérieur. « C’est un cadre paisible pour les habitants », – se satisfait Jérôme. Du côté de son enseigne, on a décidé de venir à Ginko pour la « proximité » avec la population. « On n’avait pas de magasin hors centre-ville. Le quartier est chouette, c’est joli, on a une grande terrasse », savoure le dirigeant.
De Bordeaux et la rive droite
Chez ses voisins d’Hapik non plus, on ne regrette pas d’avoir ouvert le 3 juillet. « On reçoit beaucoup de gens du quartier, mais aussi de Bordeaux, c’est très accessible avec le tram », expose Victor, équipier dans cet espace d’escalade. Sur le plan commercial, tout reste à construire, malgré tout. « Les gens commencent à venir mais certains nous disent qu’ils ne savent pas si c’est ouvert avec les travaux en cours. » Et de conclure : « Je travaille au Basic-Fit à côté en tant que coach, et je retrouve des parents qui viennent ici (à Hapik). C’est pratique. Ginko est un beau quartier qui va se développer. Il y a moyen d’en faire un bon espace de vie. »
Accroché par un harnais, un enfant escalade son mur d’une traite sous le regard fier de sa maman, venue de Lormont pour l’amener se dégourdir. Une autre surveille son fils. Elle non plus ne vit pas à Ginko. « Ça a l’air bien ici », clame-t-elle.